LA MEMOIRE EN MARCHE
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Geoles sanglantes

« Tout n’a pas été dit sur les camps de concentration. Tout ne sera jamais dit parce qu’il faudrait, pour rendre l’indicible horreur de ces lieux d’infamie, de crime et de cruauté, de lâcheté et d’héroïsme, pour suivre les stations de cet immense calvaire du 20ème siècle, il faudrait, pour exprimer le macabre et le tragique de ces milliers d’êtres humains broyés, brassés, malaxés par d’autres êtres humains, leurs frères, il faudrait, dis-je, le concours de l’imagination de Dante, le don d’expression de Shakespeare et les couleurs sombres de Goya…et tout ne serait pas dit… »

Voici un ouvrage de belle facture, dans le fond et dans sa forme. Edmond Goergen et Christian Calmes, compatriotes luxembourgeois,  y ont rassemblé leurs témoignages, dans un livre construit à quatre mains, armées « d’un fusain grave et pathétique » pour le premier, et d’une plume « acre et crue » pour le second. A travers une vingtaine de scènes de vie concentrationnaires et de portraits de personnages emblématiques, ils nous embarquent dans un voyage sombre et violent dans le camp de concentration de Mauthausen. Appuyés par des illustrations au fort pouvoir émotionnel, leurs témoignages communs et toutefois singuliers sont autant d’évocations documentaires dramatiques, parfois teintées d’espoir voire de résilience.

 

A ceci rajoutons une préface signée Pierre Frieden, un texte de haute volée littéraire et humaine, dont une partie est reproduite en introduction de notre propos, et qui sonne ici comme un avertissement supplémentaire pour quiconque s’accommoderait volontiers des violences faites aux autres :

« Lecteur, n’hésite pas devant les sombres visions qu’étale ce livre. Il faut faire un plongeon dans cet abime humain. Tu verras l’œuvre de l’homme, ton frère, et tu sauras mieux ce qui est en lui. Tu sentiras l’haleine brulante et sanguinaire de la bête féroce. Tu auras honte d’être homme, tu auras peur de l’homme, de cet être redoutable entre tous, ainsi que le proclamait le poète grec : grand par le bien et effrayant par le mal qu’il peut faire, toujours et partout, à travers le monde, sous tous les régimes fondés sur le mépris de l’homme et de la liberté ! »

Note : les dessins reproduits dans cette publication ont été réalisés au péril de la vie de son auteur, dans les camps de Hinzert et de Mauthausen. Nombre d’entre eux ont été acquis par le Musée de la Guerre à Paris.

Geôles sanglantes par Edmond Goergen et Christian Calmes - Imprimerie H. Ney-Eicher, Luxembourg, 1948

 

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